L’art des icônes en bronze émaillé était un artisanat très populaire en certains cercles religieux russes depuis le 17e siècle. Les moines de Chevetogne l’ont remis en honneur en suivant les procédés anciens. Depuis plus de 70 ans ils ont ainsi remis en circulation un nombre toujours croissant de sujets provenant de la grande collection d’originaux qui se trouve dans leur monastère.
La diffusion d’objets religieux en bronze est très ancienne. La Croix nº 10, dont l’original date du 12e siècle et a été découverte près de Kiev, ne fait que reproduire fidèlement un prototype palestinien, connu dès le 6e siècle. Il servait de reliquaire et on en trouve des exemplaires depuis le Nord de l’Italie jusqu’en Chersonèse et en Caucase.
L’art byzantin, dans les siècles suivants, a répandu dans le monde chrétien ses chefs-d’œuvre d’orfèvrerie: croix, reliquaires, pyxides portatives, appelées souvent “panaghia” (à cause de l’image de la Mère de Dieu avec laquelle ils étaient décorés). Ces objets en métal précieux, décorés de figures de saints ou de scènes hagiographiques finement ciselées, étaient souvent ornés d’émaux dont la technique connut une grande perfection à Byzance.
L’art des orfèvres et des ciseleurs s’exerçait parfois aussi sur les bords métalliques des icônes. Ces encadrements avaient tendance à s’étendre sur toute la surface de l’icône, laissant visible seulement le visage et les mains de la peinture.
Enfin apparaissent les icônes entièrement en relief. Byzance, comme la Russie sous l’influence de l’Arménie et de la Géorgie, avait toujours connu des représentations religieuses en bas-relief, mais plutôt comme ornementation que comme objet de culte. C’est seulement avec l’essor splendide de l’orfèvrerie en Géorgie aux 13e et 14e siècles, qu’on commence à voir de vraies icônes métalliques en relief. Souvent ces objets en métal précieux étaient imités dans un matériau plus économique, le bois. Cela permettait à d’autres artistes de montrer leur habileté de sculpteurs.
Finalement, vers le 17e siècle prend essor en Russie l’art de fondre des icônes en bronze. À une époque de décadence artistique, par rapport à l’art iconographique de la grande époque du 15e et 16e siècle, ce procédé permettait une grande fidélité à l’ancienne école de peinture, mais aussi une production économique qui permettait à tous les fidèles de se procurer des icônes correspondant exactement aux canons ecclésiastiques. Pour cette raison les icônes en bronze furent – et sont toujours – très populaires parmi les vieux-croyants.
Les fonds et les bords de ces icônes se prêtaient enfin à la même décoration en émail, qu’on avait coutume d’appliquer en cloisonné et filigrane sur les cadres métalliques des icônes peintes.