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Vendredi Saint

Le Seigneur Jésus, un jour, a raconté une histoire de hold-up. Un homme, peut-être un commerçant, descen¬dait de Jérusalem à Jéricho. La route passait par le désert. Des brigands de grand chemin assaillent cet homme, le battent férocement, le dépouillent et le laissent à demi-mort sur le bord de la route. Passe un prêtre, passe un lévite. Il voient le malheureux, regardent ailleurs... et continuent leur chemin. Passe un Samaritain: un hérétique, un ennemi. Il s’arrête, il a pitié de cet agonisant, il vient à son secours. Il se fait son prochain, déclare Jésus.
La tradition chrétienne a très souvent compris que le “Bon Samaritain”, c’était Jésus. Et elle a bien compris la parabole. Mais aujourd’hui, Vendredi Saint, nous pouvons dire aussi bien que Jésus lui-même est ce grand blessé, frappé de mort. Nous l’avons entendu lors de la proclamation de l’Évangile. Il y a trois condamnés à mort sur le Golgotha, trois croix sont dressées. Sur la croix du milieu agonise Jésus, l’innocent, le juste. La victime est crucifiée avec les assassins.
Jésus a été trahi, livré, abandonné par les siens. Il a été humilié, conspué, giflé, il a subi une parodie de procès. Il a été torturé. Sur la croix même les passants insultent Jésus: “Si tu es le Fils de Dieu, sauve-toi toi-même, descends de la croix, et nous croirons...”. Il ne le fera pas: trop grand est son amour pour nous, son prochain, pour acheter notre foi et notre amour à bon compte, par un miracle spectaculaire. Il blesserait notre liberté. Il n’est pas un Dieu qui séduit.
Il y avait trois croix dressées sur le Golgotha. L’Évangile de Luc nous parle des deux autres condamnés à mort, des brigands de grands chemins, peut-être des sicaires, c’est-à-dire des terroristes. Celui de gauche, les yeux dans les yeux avec sa mort prochaine, blasphème. “Si tu es le Fils de Dieu...”. Jésus ne répond pas. Le criminel à la droite du Seigneur Jésus, son complice, lui répond: notre condamnation est le salaire de nos crimes ; mais lui, Jésus, n’a rien fait. Pour nous, c’est le dernier moment pour nous repentir, pour nous reconnaître pécheurs. Et puis il s’adresse à Jésus: “Souviens-toi de moi, Jésus, quand tu entreras dans ton Royaume”.
Nous devrions rester stupéfaits par la foi de ce brigand de la droite, le bon larron. Lui aussi a entendu les quolibets: “Si tu es le Fils de Dieu...”. Pour lui ce “si” est de trop. Dans ce Jésus, agonisant comme un homme ordinaire sur la croix, dans cet homme défiguré par la souffrance, objet de sarcasme et d’ignominie, il voit le Fils de Dieu, Jésus ou Yeshoua: “Dieu sauve”. D’où surgit  sa foi? De l’aveu de ses crimes et des ses péchés. La grâce du pardon a trouvé le bon larron assoiffé de miséricorde. La misère a cherché la miséricorde.
Nous connaissons la réponse de Jésus: “Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis”. Il aura suffi du repentir et de la foi pour faire entrer le bandit au paradis. Mais c’est quoi, le paradis? Pour nous chrétiens, c’est être avec Jésus. En tout cas pour la Bible, depuis l’expulsion d’Adam et d’Ève du Jardin d’Eden, plus personne n’y était entré. À l’entrée du Paradis Dieu avait posté un ange terrible, un chérubin, au glaive de feu tournoyant, pour barrer l’accès. Personne jusqu’ici n’était passé par cette porte. Certaines “légendes” chrétiennes, avec un sens exquis de la poésie, ont imaginé l’arrivée du bon larron à la porte du paradis. Le bon larron demande d’entrer. Le chérubin refuse ferme. Une discussion serrée s’enchaîne, mais le bon larron ne désarme pas. Il est en possession du “code secret”, du “symbole perdu”. Quel est ce code secret? C’est la Croix de Jésus qui sauve tout homme qui se repent et croit au Seigneur Jésus, maître de la mort et de la vie.
“Souviens-toi de moi, Jésus, quand tu entreras dans ton Royaume”. Si nous voulons entendre comme le bon larron cet “Aujourd’hui tu seras avec moi au Paradis”, il nous faut nous munir du code secret. Et pour nous en munir il faut l’utiliser tous les jours. Sans cela nous l’oublions! Reconnaître que je suis pécheur, croire en mon Sauveur et mon Dieu, Jésus.
Nous allons maintenant nous approcher de l’icône de Jésus gisant mort au tombeau, baiser l’Évangéliaire et le visage du Christ. C’est le moment pour lui murmurer en notre cœur: “Jésus, souviens-toi de moi quand tu entreras dans ton Royaume”. Écoute-le bien: toi qui es baptisé dans la mort et la résurrection, il te dit: “Aujourd’hui...”. Il a hâte de nous sauver.