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Messe de Pâques

CHERCHEZ LE RESSUSCITÉ
Ac 10, 34a 37-42 * Col 3, 1-4 * Jn 20, 1-9

Nous voici au matin de Pâques, dans le calme du matin de Pâques après la nuit pascale qui a laissé éclater notre joie dans la foi au Christ ressuscité. Maintenant nous sommes appelés à intérioriser notre joie pour qu'elle ne s'évanouisse pas et que notre foi pascale s'affermisse sur la base solide de l'Évangile. Car tout autre a été ce matin de Pâques pour les disciples et amies de Jésus dont trois occupent le passage que nous venons d'entendre. Pour eux et pour elle, cela a été la surprise totale et l'inattendu. Les choses se sont passées autrement que nous l’aurions imaginé. Ce matin n’a vraiment rien de triomphal. Ce matin de Pâques débute dans l'obscurité et la consternation, la tristesse et la peur. Ici Pâques est un lent passage de la peur à la joie. Les femmes au tombeau s'enfuient; les disciples ne croient pas; les pèlerins d'Emmaüs cheminent déçus. Plus encore que les trois premiers Évangiles, celui de Jean est particulièrement sobre.
Dans ce premier de ses quatre récits de la Résurrection: pas de tremblement de terre, pas d'ange assis sur la pierre, pas d'apparition du Ressuscité. Il n'y a qu'un tombeau vide et le soupçon d'un rapt du corps de Jésus. Est-ce donc une annonce de la Résurrection, cet évangile que nous venons d'entendre? Et comment se comportent donc les trois personnages de notre récit? Une seule parole est prononcée: On a enlevé le Seigneur du tombeau et nous ne savons pas où on l’a posé. Qui: nous? Ce ne sont pas seulement Marie de Magdala, Pierre et Jean. Nous tous, nous nous sentons concernés, car combien de fois ne disons-nous pas: “Où es-tu Seigneur?” et nous ne comprenons pas les silences de Dieu.
Au fond, nous savons où il a été enlevé et où il se trouve et où il faut le rechercher. S. Paul nous l’a dit: Recherchez les choses d’en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu. Mais cela ne nous satisfait pas. Pourtant à la veille de sa mort Jésus avait prié: Père, je veux que là où JE SUIS, eux aussi soient avec moi (Jn 17, 24). Donc pour savoir où est Jésus, il faut savoir où est le Père et pour savoir où est le Père, il faut savoir où est Jésus. Cercle étrange, comment le comprendre? Il faut d’abord écouter, comprendre et aimer Jésus, lui qui a dit: Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole et mon Père l’aimera,  et nous viendrons vers lui et nous ferons chez lui notre demeure (Jn 14, 23).     
Si vraiment nous cherchons le Ressuscité, nous le trouverons en nous-mêmes et dans nos prochains, en notre cœur et sur le visage de notre frère, de notre sœur. Chercher, connaître, comprendre, aimer: le chemin qui y conduit, c’est la foi. Il faut croire pour comprendre, il faut croire pour aimer. Croire devant le tombeau vide, comme Jean: Il vit et il crut. Croire devant l’absence à la présence du Ressuscité, une présence beaucoup plus réelle, beaucoup plus intense que s’il était présent devant nous en chair et en os. Voir cette présence avec les yeux de la foi, avec les yeux du cœur. Une présence qui va au-delà des limites du visible. Cette présence-là est la réponse de Dieu à l’homme “qui est habité par une sorte d’immensité intérieure, et ne trouve sa vérité qu’à dépasser sa condition mortelle, qu’à briser les limites” (M. Corbin), comme dit Pascal: “L’homme dépasse l’homme infiniment”.
Mais la foi repose sur le témoignage de l’Écriture Saint. Ce que Jean a vraiment vu, d'un regard intérieur, c'est l'Écriture réalisée. Ce n'est pas de voir le Christ ressuscité qui importe, mais de croire aux Écritures Saintes. N'est-ce pas justement le souci du Christ ressuscité d'ouvrir les yeux à ses disciples, aux pèlerins d'Emmaus et à nous de voir ce qui est écrit: "Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans la gloire. Et, commençant par Moïse et parcourant tous les prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait" (Lc 24, 27). Parmi les disciples de Jésus Jean un premier qui, sans l'appui d'aucune apparition, a entrevu le mystère du Ressuscité. Il nous montre le chemin de la foi, ce chemin de toute notre vie, au long duquel "notre cœur devient tout brûlant au-dedans de nous-mêmes" (Lc 24, 32), parce que "Jésus nous explique les Écritures".
Alors, au cours de la fraction du pain, comme en cet instant même, nos yeux s'ouvrent et nous le voyons de notre œil intérieur, à l'instar des milliers de pèlerins à Jérusalem, à l'Anastasis en cette Pâque commune à tous les chrétiens qui, contemplant le tombeau vide, en voient jaillir  la lumière pascale qui illumine le monde entier, Jésus-Christ et Jésus-Christ Ressuscité.   Amen.