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Dimanche de carnaval 2025

 Ce récit évangélique du Jugement dernier que nous connaissons bien et qui hante peut-être nos imaginations, esd, il faut le rappeler une parabole. Une parabole n'est pas une histoire simple, elle n'est pas non plus un reportage. Une parabole est l'affirmation, l'enseignement d'une vérité profonde à travers des images courantes de la vie. Nous devons nous efforcer d’en retirer le sens intérieur car elle a et gardera toute son actualité jusqu’à la fin de temps. Tous et chacun de nous sommes concernés quotidiennement et constamment par ces paroles de Jugement. Dans l’histoire de la Chrétienté, cette parabole a, hélas, pesé très lourdement sur la conscience des chrétiens. Il en a souvent émané l’image menaçante d’un Dieu qui juge avec rigueur et qui sanctionne avec sévérité. En fait c’était une déviation du christianisme qui fait du Dieu amour un tyran, un despote. Dans cette triste perspective, la crainte de la sanction passe au premier plan et le bien que nous faisons ne puise plus sa source dans l’amour, dans l’amour de Dieu pour nous. Dès lors, les bonnes œuvres que nous accomplissons ne sont plus suscitées par la reconnaissance du Seigneur dans l’autre, mais par la crainte des souffrances et la terreur que nous inspire le châtiment.

 Après avoir écarté cette image regrettable, il importe de pénétrer plus en profondeur dans cette parabole. La véritable nouveauté de notre évangile d’aujourd’hui, la révélation surprenante est que le Fils de l’homme, le Christ Sauveur, glorifié, se révèle ici comme s’identifiant aux affamés, assoiffés, nus, prisonniers, étrangers, malades, réfugiés, persécutés, en fait tous les hommes malades physiquement comme psychiquement. Il assume leur cause et les prend pour frères par compassion.

Dans le mystère du Christ, nous pouvons en effet distinguer diverses modalités de Sa présence dans le monde, dans l’Église et dans les cœurs humains. Tout d’abord, le Christ a revêtu notre humanité et a vécu dans le monde. Puis, Il est ressuscité, fut élevé aux Cieux. Depuis, le Christ siège en tant que Dieu-homme à la droite du Père pour toujours, mais en même temps, comme Il nous l’a promis : « Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. » Le Christ est parmi nous. Tout d’abord, nous vivons sa Présence dans la Parole de Dieu telle que nous l’entendons dans l’Évangile parce que le partage de la Parole de l’Évangile est aussi une communion véritable à la Présence du Seigneur. Puis, nous faisons l’expérience de sa présence dans la divine communion eucharistique lorsque nous nous approchons du saint calice et que nous recevons le Corps et le Sang du Christ. Comme le soulignait saint Nicolas Cabasilas, un grand auteur spirituel du XIVe siècle, dans la sainte eucharistie ce n’est pas nous qui assimilons le Christ à nous, mais c’est le Christ qui nous assimile à lui-même. Mais il est encore une autre manière par laquelle le Christ est avec nous jusqu’à la fin du monde. Le Christ s’identifie avec les plus pauvres et avec les plus malheureux. Ce n’est pas nous qui opérons cette identification dans un regard de pitié, le Christ ne nous demande pas si nous voulons que cette identité se fasse, le Christ fait lui-même le choix de cette identité. Par conséquent, il ne s’agit pas de savoir si ces pauvres et malheureux ont la foi en Dieu, s’ils connaissent le Christ, s’ils ont un certificat de baptême, s’ils sont orthodoxes ou catholiques. Simplement ce sont des malheureux, des pauvres, des personnes qui souffrent dans leur âme ou dans leur chair. Je dirais que par prédilection, le Seigneur choisit d’être avec eux, de s’unir à eux, d’être en communion avec eux. Le Seigneur pénètre tellement en eux qu’en définitive nous ne percevons plus qui est le pauvre et où est le Seigneur, c’est là le mystère de l’identification que nous enseigne la parabole du Jugement Dernier.

Par conséquent donner du pain, secourir, consoler, visiter, vêtir ceux qui sont dans le besoin, c'est servir littéralement Jésus lui-même. Et nul mieux que saint Jean Chrysostome ne trouve les termes, je dirais - les expressions théologiques - pour dire que autant par ses paroles à la Sainte Cène « Prenez, mangez, ceci est mon corps, buvez en tous, ceci est mon sang », Jésus identifie le pain et le vin à son corps et à son sang offerts pour la vie du monde ;  autant il affirme une autre identification de la présence de Jésus dans la vie et dans la souffrance des pauvres. Nous pouvons dire ainsi que c'est le sang du Christ qui coule dans la souffrance humaine. Je crois que toute souffrance humaine participe, communie au sang et à la souffrance du Christ. Jésus assume sur Lui toutes souffrances et vient consoler alléger, toutes souffrances humaines.  

Par conséquent, il y a dans cette parabole non seulement l’identification du Christ à notre prochain qui souffre, mais il y a encore, parallèlement, un appel à imiter le Seigneur dans Son amour, à vivre de jour en jour l’Amour du Christ.

Que le Seigneur nous donne, dès aujourd’hui, cet apprentissage de la compassion, de la miséricorde et du véritable amour ! Qu’Il ouvre nos yeux et qu’Il nous apprenne à discerner en nos frères le Visage, l’Image et la Présence réelle du Christ ! Que cet apprentissage dans le Christ nous donne de sortir de nous-mêmes et d’aimer ! Amen.