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Ascension 2023

« Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? » (Ac 1, 11). L’Ascension du Seigneur Jésus semble susciter chez ses disciples autant de perplexité que sa Résurrection a éveillé de doutes. Quant à leur obstination à croire à une restauration politique de la royauté en Israël et, par conséquent, leur incompréhension du dessein de Dieu, elle en deviendrait proverbiale. Mais voilà, j’en conviens, une façon bien sévère de parler de ces hommes, les apôtres, confrontés les premiers à un si grand mystère, - la mort et la résurrection du Seigneur, - qu’il leur faudra pénétrer petit à petit au souffle de l’Esprit, au rythme de la prédication, le Seigneur agissant avec eux.

Ce flux de vie nouvelle est trop dense pour être assimilé en un seul instant. Si l’évangéliste Luc, qui nous décrit l’Ascension en deux récits, a rassemblé, pour ne pas dire résumé, dans la finale de son évangile les événements liés à la Résurrection, - apparitions aux femmes, à Pierre, aux disciples d’Emmaüs, aux Onze, et l’Ascension, - c’est pour en montrer la dynamique. L’évangéliste Jean en a d’ailleurs fait autant, et a même fait un pas de plus puisque, selon lui, Jésus envoie son Esprit sur les apôtres dès le soir de Pâques. 

Une fois établi cet unique mouvement ascendant du Fils vers le Père, car le Fils est tout tourné vers le Père, l’évangéliste peut revenir plus en détail, au début du livre des Actes des Apôtres, sur les événements qui ont suivi la Résurrection, le premier jour de la semaine. Les deux récits ne s’excluent pas, ils se complètent. Le fait que Jésus soit monté vers le Père sans témoin, sauf peut-être Marie de Magdala (Jn 20, 17), dès le matin de Pâques n’empêche nullement ses apparitions aux disciples pendant les quarante jours qui suivent, et l’ultime d’entre elles avec son élévation dans la gloire en leur présence. Remarquons au passage la présence d’anges, ici comme à Pâques, pour témoigner de ce qui advient et l’expliciter. Remarquons aussi que si la nuée dissimule Jésus aux yeux de ses disciples, elle ne le rend pas absent. De son propre aveu, Jésus reste avec eux, avec nous, « pour toujours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).

Pendant ces quarante jours, nous dit saint Luc, Jésus s’entretient familièrement avec ses disciples du Royaume de Dieu, ce Royaume de Dieu qui sera le grand thème de la prédication des apôtres comme il a été celui de la prédication de Jésus. Rien n’empêche de penser que ces entretiens sont ponctués des promesses que Jésus a faites à ses disciples après la Cène ainsi que le rapporte saint Jean (Jn 13-17) : « je vais vous préparer une place » (Jn 14, 2), « je ne vous laisserai pas orphelins » (Jn 14, 18), « celui qui m’aime sera aimé de mon Père » (Jn 14, 21), « le Paraclet, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et vous rappellera tout ce que je vous ai dit » (Jn 14, 26), « c’est votre intérêt que je parte » (Jn 14, 7), « l’Esprit de vérité vous introduira à la vérité tout entière » (Jn 16, 13). Ce sont là autant de promesses qui nourrissent l’espérance chrétienne et stimulent l’engagement chrétien !

« Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? » (Ac 1, 11). Invitation à peine déguisée à passer à l’action, à se mettre à l’œuvre et à travailler à l’avènement de ce Royaume de Dieu tant attendu. Les disciples le comprendront bientôt, une fois revêtus de la force d’en haut, l’Esprit Saint envoyé par le Père.   

« Hommes de Galilée … ». Et nous, Galiléens spirituels, nous qui avons été saisis par ce Jésus de Nazareth et nous sommes mis à sa suite, où en sommes-nous ? Ne nous surprenons-nous pas de temps à autre à regarder le ciel d’un air hébété et les bras ballants, ne sachant quelle décision prendre ? En sommes-nous encore à essayer de faire entrer Dieu dans nos projets ou nous laissons-nous convertir à son dessein si incompréhensible qu’il puisse nous paraître ? Sommes-nous ouverts à l’avenir de Dieu ? Vivons-nous au souffle de cet Esprit promis ? Fréquentant les Écritures, en avons-nous vraiment l’intelligence que Jésus nous en a donné ? Bref, sommes-nous prêts à porter un regard neuf sur une situation nouvelle, confiant que le Seigneur ne nous a pas laissés orphelins et qu’il est avec nous « pour toujours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20) ? Soyons-en témoins par notre adoration et par notre action !