Maintes fois avant la passion, la croix et la résurrection, le Seigneur Jésus avait parlé à ses disciples de son départ. Ils ne comprenaient pas ces paroles du Maître, et sans doute même avaient-ils peur de les comprendre...
"Mes petits enfants, je ne suis plus avec vous que pour peu de temps. Vous me chercherez et... là où je vais, vous ne pouvez venir" (Jn 13,33). "Simon Pierre lui dit: Seigneur où vas-tu? Jésus lui répondit: Là où je vais, tu ne peux me suivre maintenant, mais tu me suivras plus tard" (Jn 13,36). Nous en sommes là le soir de l'arrestation de Jésus.
Tout au long des semaines qui viennent de s'écouler nous avons fait mémoire et célébré l'oeuvre que le Seigneur Jésus a accompli pour nous sauver et nous donner la vie.
"Où vas-tu, Seigneur?" demandait Pierre. Nous le demandons avec lui. Jésus répond le matin de Pâques: "Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu" (Jn 20,17). Tout le secret de Jésus, Messie et Fils de Dieu, est contenu dans cette parole à Marie-Madeleine: aller vers Dieu, son et notre Père, nous partager sa vie, sa joie, son intimité avec le Père. Nous ne sommes plus orphelins de Dieu, du Père.
Les évangiles nous parlent d'une première période après la résurrection du Seigneur, qui symboliquement dure quarante jours. Ils ne cachent pas que les disciples après le Vendredi Saint et l'ensevelissement de Jésus étaient perdus, anéantis. Un grand et beau rêve s'était brisé. Le groupe des fidèles du Rabbi se débandait.
Et puis la surprise, l'incroyable surprise! Jésus, l'absent englouti dans la mort, se rend présent, est là! Cela n'empêche que les disciples et apôtres pendant ces quarante jours se trouvent ballotés entre la joie et la tristesse, entre la vie reçue et le désespoir, entre la foi et le doute, entre vrais et faux espoirs.
Nous l'avons entendu dans la lecture de l'épître tirée des Actes des Apôtres qui racontent les faits et gestes des premières communautés chrétiennes. Le Ressuscité leur parle du Règne de Dieu. Les disciples comprennent avec difficulté, comme nous d'ailleurs, ce qu'est et sera le Règne ou Royaume de Dieu. "Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le Royaume pour Israël?" (Act 1,7). Pourtant Jésus n'avait-il pas déclaré devant Pilate: "Mon règne n'est pas de ce monde" (Jn 18,36). Le Règne de Dieu advient le jour de la Pentecôte, lorsque le Seigneur envoie l'Esprit Saint d'auprès du Père.
Aujourd'hui, en la fête de l'Ascension, nous avons entendu proclamer dans l'évangile: "Jésus se sépara d'eux, il fut emporté au ciel" (Lc 24,51). Est-ce que Jésus est parti pour de bon?
La séparation dont il est question n'est que physique. Après l'Ascension et la Pentecôte Jésus est plus réellement présent qu'il n'était physiquement présent il y a deux mille ans en Galilée et à Jérusalem. Nous en avons pour preuve la voix qui interpella Paul sur le chemin de Damas: "Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu?" (Act 9,4). Le persécuteur des frères de Jésus le blesse lui. Au dernier jugement nous découvrirons la présence réelle, insoupçonnée, du Christ dans les pauvres, les malades, les étrangers... (Mt 25, 31-46).
Jésus est là . Il est ici dans cette église, au milieu de nous. La Parole proclamée et le sacrement de son Corps et de son Sang célébrés,sont sa présence réelle de vie. Et nous espérons que prendra vite fin le confinement qui prive les enfants du Père d'une communion "non-distanciée".
Le jour de 'Ascension Jésus bénit les siens et son Eglise. Il invoque et impose le Nom ineffable sur son Peuple, l'Eglise. C'est le gage du don du Saint Esprit qui sera donné le jour de la Pentecôte. Le Seigneur Christ bénit comme Grand Prêtre de l'Alliance nouvelle. L'Eglise répond à cette bénédiction en bénissant Dieu, en lui rendant grâces (Lc 24,53).
N'est-ce pas ce que nous pouvons faire en temps d'épreuves? Bénir Dieu pour sa présence, pour la vie reçue et donnée. Bénir Dieu dans les peines et les joies, dans les doutes et la foi, quoiqu'il nous en coûte. Bénir Dieu pour ce qu'Il nous donnera et ne nous donnera pas. Bénir Dieu, afin qu'Il nous bénisse de la force et de la joie de l'Esprit Saint. Amen.
